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Le Congo : avatar de l'État au cœur de la mondialisation ?


Vendredi 22 Février 2013



Prix 2012 du meilleur livre étranger, Congo – Une histoire(1) est une monographie originale. Son auteur, l'historien belge David Van Reybrouck, est également écrivain. En quelque 700 pages, il dresse avec style un portrait du Congo d'hier, mais surtout de celui d'aujourd'hui. Car c'est bien le Congo contemporain, ses « Congolais ordinaires » et ses histoires « exceptionnelles » qui intéressent ici David Van Reybrouck.



Le Congo : avatar de l'État au cœur de la mondialisation ?
Congo se distingue par certaines particularités formelles. Sans doute dans une tentative de faciliter la lecture, l'auteur semble avoir structuré autant que faire se peut ses chapitres autour d'un témoignage principal. Ces contributions, étayées par d'autres interventions et sources historiques, constituent ainsi le fil directeur d'une partie du travail historiographique contenu dans ce livre.
 
Suite à l'apparition de l'homme sur le territoire de l'actuel Congo, l'arrivée des Européens et le début de la traite négrière, constitue un temps fondamental pour l'histoire du pays. Après en avoir fait un rapide résumé, David Van Reybrouck choisit de faire commencer son développement au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, au moment des grandes explorations du pays. Cet épisode est à nouveau le fait d'Européens qui entreprennent alors notamment de cartographier le pays.
 
Se dessine alors la future emprise de la Belgique sur le pays. C'est en effet le roi Léopold II qui finance l'établissement des premières colonies congolaises et la création de l'État indépendant du Congo. David Van Reybrouck rappelle ainsi quelques éléments distinctifs de l'histoire du Congo : le pays « n'a […] pas commencé comme une colonie » à la différence de nombreux pays d'Afrique, mais bien comme un État. Très vite cependant, Léopold II fait du Congo le grenier de la Belgique, au détriment du développement de ce pays; c'est la période du « caoutchouc rouge ».
 
Prenant le contrepied des analyses historiques classiques, David Van Reybrouck montre ici en quoi la présence de l'administration belge a contribué à accentuer certaines tensions sur le territoire congolais. Entravant les échanges entre tribus et spoliant les ressources, la période du caoutchouc rouge est aussi celle des bouleversements sociaux et de la misère croissante pour la population du Congo. Bien que la Seconde Guerre mondiale accélère l'effondrement de cette domination étrangère, le ferment d'un conflit intérieur n'en reste pas moins présent.
 
L'histoire postcoloniale du Congo est ainsi marquée à ses débuts par les troubles politiques. Ceux-ci ne cesseront qu'avec l'arrivée de Mobutu au pouvoir en 1965. En dépit d'une accalmie longue de 30 années, les troubles reprennent à la faveur du génocide rwandais.  Malgré la conquête du pouvoir par Laurent-Désiré Kabila, et la succession de son fils Joseph en 2002, David Van Reybrouck insiste sur l'instabilité qui plane encore sur le Congo.
 
Congo fait apparaître l'ancienne colonie belge comme un pays dont l'histoire a, en tout temps, été grandement déterminée par l'influence de l'extérieur et la politique internationale. Aujourd'hui, l'étranger, la Chine notamment, continue d'ailleurs de participer activement la reconfiguration de ce pays en développement. David Van Reybrouck le montre dans son dernier chapitre, citant les nouvelles formes d'échange économique l'Asie. Ainsi, cet ouvrage vivant et frappant semble se conclure en une forme de suggestion : et si l'histoire du Congo était celle d'un défi, celui de la construction d'un État dans un monde mondialisé ?
 
 
(1) VAN REYBROUCK, D., Congo- Une histoire, Actes Sud Editions, 2012, 864 pp..










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