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La voiture électrique : le succès annoncé ou la catastrophe évidente


Philippe Cahen
Mercredi 16 Octobre 2019



La voiture électrique est annoncée comme l’évidence du futur. Et bien sûr elle sera un jour autonome. Et surtout ne répétez pas que sur les huit premiers mois de 2019, Tesla a fourni 26,8% des 206.854 voitures 100% électriques, soit 2,1% du marché de l’Europe de l’Ouest (source l’analyste Matthias Schmidt). Renault Zoe + Nissan Leaf font moins …



La voiture électrique : le succès annoncé ou la catastrophe évidente
Une bataille à coups de milliards !

Depuis deux ans, le sujet principal est de savoir qui sera le cerveau de la voiture. En mai 2017, Samsung a acheté 8 milliards de dollars, l’américain Harman, spécialisé dans les systèmes audio embarqués et les services connectés. Au même moment, Renault achète la R&D Intel France. Et PSA s’associe avec Huawei en novembre. En septembre 2018, c’est Google qui s’associe avec l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi. Car les données des véhicules connectés valent de l’or. Evidemment, les assistants vocaux se battent pour être présents dans la voiture.

Et comme il faut de l’électricité pour faire rouler ces voitures, les constructeurs sont à la chasse aux batteries : Volvo avec le chinois CATL et le sud-coréen LG Ghem, comme Volkswagen avec de plus Samsung, SDI et SKI ; Nissan a vendu son usine de batterie ; Tesla construit ses propres usines (Gigafactory) ; PSA s’associe avec Saft, etc.
L’argument déterminant est que d’ici 2024 (source Alix Partners, septembre 2019), la batterie devrait coûter sous les 100$ le kilowattheure contre 1.000$ en 2010 résultat de l’amélioration des performances et des effets d’échelle liés aux volumes.

Ce dont il ne faut pas parler

Ne parlons pas du bilan écologique de la voiture électrique : il est catastrophique à la fabrication comme à la fin de vie et donc le recyclage. Il faut accessoirement rappeler que la production de nickel, lithium, cuivre, cobalt, manganèse va passer respectivement à un coefficient 10.000, 8.000, 6.500, 4.000 et 2.000 … environ. Et chacun sait les conditions d’hygiène et sécurité de ces mines notamment de cobalt (République Démocratique du Congo pour 60%), voire la sécurité d’approvisionnement. Il n’est pas certain que les mines existantes suffisent pour satisfaire la demande de voitures électriques.

Mais restons à l’électricité.

Une voiture électrique c’est forcément écologique puisqu’elle ne produit pas de carbone (chut, on a dit que l’on ne parlait pas de la construction ni de la recyclabilité de la voiture). Et de plus, il suffit qu’elle roule à l’énergie renouvelable pour être encore plus propre. A condition qu’en absence de cette énergie, on ne fasse pas tourner les centrales à charbon, à tourbe, au gaz. Le pays le plus branché en renouvelable en Europe … est … est … Non, pas l’Allemagne. Pas la France. Mais le Royaume-Uni. Pour la première fois au troisième trimestre 2019, la production d’énergie renouvelable a dépassé les énergies carbone (nucléaire, 19,5% de la production électrique).

La batterie ! La batterie ! la batterie !

Une fois cela résolu, il faut pouvoir recharger la batterie, même en dehors de son travail ou de chez soi. Parait-il qu’en 2018 (source ACEA) il y avait 145.000 points de recharge en Europe dont en France 12% sont en recharge rapide (30 mn pour parcourir 160 km) dont il existe … 5 modèles (source Avere France : association nationale pour le développement électrique), les 82% sont en recharge normale (8 heures selon la même source). Heureusement qu’il n’y a pas de recharge lente. Il faudra 2.8 millions de bornes dans 10 ans. En espérant que les prises sont uniformisées, de qualité, bien entretenues et bien positionnées.

Bref qu’elles soient naturelles dans l’utilisation de la voiture. En fait, les bornes sont de piètre qualité, non branchées souvent, défectueuses, incompatibles avec la voiture et les multiples opérateurs à tarifs variables ne facilitent rien. Autant ne pas rouler trop loin de sa prise de qualité, au travail ou chez soi.

Les doutes – ou les craintes - sur la voiture électrique

Reste la rentabilité du système (Carlos Tavares, CCFA) : il faut augmenter le prix de l’électricité à la borne pour fournir des ressources financière pour assurer la qualité des bornes. Donc finalement, même si le prix ramené à la batterie baisse, le prix de l’électricité doit augmenter.

Début octobre 2019, Dyson stoppe son projet de voiture électrique. On n’en connait pas à ce jour la cause. 400 personnes travaillaient sur ce projet. En 2017, il se disait « prêt à investir 7 milliards de £ dans l’aventure ». Est-ce un signal faible sur la viabilité du projet ? De même que les informations sur les dangers de la voiture électrique (trois risques sur la batterie : surcharge, choc à la batterie, feu) sont difficilement accessibles.

Alors la voiture électrique est-elle justifiée par les milliards déjà engloutis ? Les ventes tardent à décoller. D’autres moteurs sont possibles comme le moteur à hydrogène qui ne produit ni gaz à effet de serre, ni particule et ne rejette que de l’eau, et le plein se fait en 3 mn. Mais c’est un autre sujet.

Reste que la voiture autonome c’est pour dans trois à cinq ans pour ses débuts confirmés et alors, le besoin de voiture chutera et la voiture sera d’usage et plus de propriété. C’est une autre histoire … à trois ou cinq ans …

 La voiture électrique, cela pourrait être bien. Ce n’est pas certain du tout que ce le sera.

Je repars en plongée ….

Philippe Cahen est conférencier-conseil en Prospective
Un signal faible est un fait paradoxal qui inspire réflexions. Ce sont ces réflexions que développent ici Philippe Cahen, "signauxfaiblesologue".

 










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