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Pomme de terre OGM : des problèmes cachés ?


Lucien Tergal
Jeudi 24 Janvier 2019



Les OGM suscitent de nombreuses questions quant à leur innocuité sur la santé. Pour ses opposants, elle demeure incertaine. Les partisans, eux, avancent les nombreux bénéfices potentiels de cette technologie pour l’accès à une nourriture plus saine. Exemple avec la White Russet, qui fait l’objet de vives critiques de la part d’un ancien de Monsanto.



Le 2 mars 2010, la Commission européenne autorisait pour la première fois la culture de la pomme de terre transgénique Amflora à destination de l’industrie et de l’alimentation animale. Elle laissait toutefois la décision d’accepter ou non cet OGM à chaque État membre.
Notons qu’en France, la culture des OGM est interdite. Il est malgré tout possible d’en importer. Les produits génétiquement modifiés commercialisés dans l’Union européenne à des fins d’alimentation humaine ou animale sont régis par un règlement européen et soumis à un étiquetage particulier dès qu’ils contiennent plus de 0,9 % d’OGM. Les produits issus d’animaux nourris avec des OGM (viande, lait, œufs, beurre, crème) ne sont pas soumis à cet étiquetage. Au total, 103 aliments contenant des OGM ont reçu une autorisation de commercialisation en Europe (liste au 30 novembre 2018) : maïs, soja, colza, le coton ou la betterave sucrière. En pratique, on trouve très peu d’aliments OGM en France ; on les retrouve principalement dans les aliments transformés comme les céréales, la farine ou les sirops... (1)

La White Russet, pomme de terre OGM
 
La première génération de pommes de terre OGM a été approuvée par le Département de l’Agriculture des États-Unis en 2014 et est arrivée dans les magasins l’année suivante. En 2016, elle a été approuvée au Canada. Cette pomme de terre s’appelle la « White Russet » (rousse blanche en français) dont les qualités sont vantées sur un site internet qui lui est consacré (1). Il y est dit que la White Russet représente « une grande avancée dans l’industrie de la pomme de terre ». Il y est suggéré que les pommes de terre OGM conservaient tous les traits des pommes de terre normales à mesure qu’elles acquéraient trois caractéristiques supplémentaires : une résistance accrue aux maladies, une uniformité visuelle améliorée et une résistance améliorée.

En effet, à en croire cette présentation, la White Russet aurait été modifiée génétiquement pour rester blanche quand on la pèle ou qu’on la coupe. Ces pommes de terre forment moins de taches grisâtres lorsqu’elles reçoivent des chocs au moment des récoltes ou du transport. Selon le fabricant des semences, « cela réduit de 15 % les pertes lors de la récolte, réduisant les émissions de CO2, l’usage de pesticides et la consommation d’eau ». Tout semble donc aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

Fuite en avant industrielle ?

Seulement voilà, Caius Rommens, l’ex-directeur de JR Simplot (société spécialisée dans la transformation de produits agroalimentaires à base de pomme de terre), puis chef de laboratoire chez Monsanto, révèle les dangers cachés des pommes de terre OGM qu’il a lui-même contribué à créer. Caius Rommens, l’inventeur de cette pomme de terre OGM vient en effet de publier un livre intitulé « Pandora's Potatoes: The Worst GMOs » (La patate de Pandore : les pires OGM), dans lequel il dénonce les dangers de cette pomme de terre et d’autres OGM.
Il révèle son erreur : « Je faisais tester mes pommes de terre en serre ou dans les champs, mais je quittais rarement mon laboratoire pour aller sur place. En effet, je pensais que ma connaissance théorique des pommes de terre était suffisante pour améliorer les pommes de terre. C’était une de mes plus grandes erreurs. » Apprenti sorcier ? « Nous étions supposés comprendre l’ADN, et faire uniquement des modifications utiles sur le code génétique. Mais le fait est que nous en savions autant sur l’ADN que l’Américain moyen connaît la version en sanskrit du Bhagavad Gita », reconnaît-il. Il ajoute « Nous en savions juste assez pour être dangereux, en particulier si vous combinez notre ignorance avec nos préjugés et notre étroitesse d’esprit. Nous étions obsédés par les progrès de court terme (dans le laboratoire) au détriment des problèmes de long terme (dans les champs). » Pour Caïs Rommens le même type de pensée avait déjà produit le DDT, les PCB, l’agent Orange ou les hormones de croissance : « Je crois qu’il est important que les gens comprennent combien les ingénieurs en génétique peuvent être ignorants, biaisés et se tromper. »
Pour l’auteur de ce brûlot, les pommes de terre OGM contiendraient des caractères génétiquement instables, dont deux ont déjà été perdus et d’autres en voie de disparition. Et ce ne serait pas tout : perte de rendement important, dissimulation des "ecchymoses-chocs" et propagation de maladies… En tant qu’aliments modifiés, elles auraient perdu leur goût d’origine et elles contiendraient également une variété de nouvelles toxines susceptibles de poser des problèmes de santé publique.

Quoi qu’il en soit, les pommes de terre OGM entrent discrètement sur le marché avec des noms inoffensifs tels que Amflora (3) ou Innate (4)… Caius Rommens, l’auteur de "Pandora’s Potatoes", pour sa part, y voit les pires OGM jamais commercialisés.
 
(1) https://www.futura-sciences.com/sante/questions-reponses/ogm-faut-il-manger-ogm-10444/
http://whiterusset.com/
(2) http://whiterusset.com/
(3) https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/developpement-durable-point-pomme-terre-ogm-amflora-22897/
(4) https://fr.wikipedia.org/wiki/Innate

 




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